A propos du projet
Depuis 3 ans, l’école « Les peupliers » située au cœur d’Anderlecht place au centre de son projet d’établissement le contact direct des enfants avec le vivant, la nature, les animaux. Suite à un constat de violence entre élèves, l’école a fait le pari d’un meilleur vivre ensemble basé sur le soin et le respect des êtres vivants et la concrétisation des apprentissages scolaires. Visite d’une école pas comme les autres !
A peine passée la porte de l’école, entend-on les cris des enfants dans la cour de récréation se mêler à ceux des canards, chèvres et poules. C’est que toute une ménagerie vit au rythme de cette école, ou peut-être est-ce l’inverse ? En effet, il y a 3 ans, l’aménagement de la cour de récréation a libéré des espaces verts. Madame Leemans, directrice de l’école, en collaboration avec Olivier Divry, professeur d’éducation physique, y ont vu une opportunité de projet. « A cette époque, l’école faisait face à des problèmes de violence entre élèves que nous avions identifiés comme liés aux jeux vidéos et à une déconnexion du réel.», explique Madame Leemans. Sous l’impulsion d’Olivier Divry, le projet s’est construit autour de la présence d’animaux dans l’école et de la relation affective qui pouvait se créer avec les enfants.
METTRE LA MAIN À LA PATTE
Ainsi, dès la phase de construction, les enfants ont été impliqués dans le projet. Coordonnés par Monsieur Divry, ils ont pris les mesures pour les enclos, calculé les périmètres et les aires, la quantité de grillage et de clôture nécessaire. Ils ont également participé à la construction des maisonnettes, réalisé les devis et écrit des lettres pour demander les autorisations. Ces premières étapes ont permis à l’ensemble de l’école de prendre conscience de l’intérêt pédagogique du projet. « Les liens avec les matières à enseigner étaient multiples (mathématique, géométrie, expression écrite…), ce n’était pas quelque chose en plus, mais bien un outil d’apprentissage ! », précise Olivier Divry. Pour rendre cela possible, une organisation de travail en demi-groupes a été mise en place. Une partie du groupe travaillait la théorie avec son institutrice, l’autre prenait en charge la partie pratique, le tout en alternance.
Une fois les constructions terminées, les animaux ont progressivement été installés. Pour répondre au mieux aux besoins spécifiques de ceux-ci et leur prodiguer des soins appropriés, toutes les classes ont reçu une animation gratuite du service éducation de l’asbl Gaia. « La présence d’animaux vivants dans l’école vise aussi la responsabilisation et l’autonomisation des élèves », commente la directrice. « A tour de rôle, ils s’occupent du nourrissage et de l’entretien des enclos et prennent cela très à cœur ! ». Le mercredi est, par exemple, réservé aux maternelles. Pour s’adapter aux motivations et réticences de chaque enseignant, la participation est libre. Un tableau visible de tous permet aux classes d’indiquer les animaux nourris durant la journée. Ainsi, les institutrices sortent auprès des animaux à leur guise pendant les heures de cours. Et pour s’assurer que tous les enfants en profitent, les professeurs d’éducation physique y consacrent systématiquement vingt minutes de leur cours. « Courir avec les chèvres dans la cour de récréation ou courir autour d’un gymnase, c’est une activité en extérieur où les enfants sont actifs ! », s’exclame Monsieur Divry.
GRANDS ET PETITS, TOUS CONQUIS !
L’école compte désormais dix-sept lapins, deux cobayes, deux chèvres, des poules, des canards et des oies. Les lapins vivent en classe ou plutôt font partie de la classe. Aussi, pendant les leçons, le lapin circule librement, la classe est aussi à lui. En demi-groupe, le lapin sur les genoux avec un fond musical, une toute autre ambiance s’installe. Les institutrices y voient un réel bénéfice pour leur travail en classe. Le vendredi est synonyme de grand nettoyage. Par groupe de cinq, les enfants de la 3ème à la 6ème année changent la paille, nettoient les cages et les maisonnettes, remplissent les mangeoires et les abreuvoirs. Ce sont les plus grands qui expliquent aux petits. A l’aide de tableaux illustrés, ils échangent, passent du temps ensemble et se respectent. Cette collaboration permet aussi au projet de perdurer lorsque les grands quittent l’école. « Depuis que le projet est sur les rails, on a réellement vu la violence diminuer dans l’école. », ajoute Madame Leemans, « C’est très encourageant, on a le sentiment d’avoir réussi quelque chose ! ».
Les trucs et astuces des Peupliers :
- Proposer un large choix d’activités sans imposer
- Être convaincu que la concrétisation des apprentissages est primordiale
- Répondre à l’appel à projets de Bruxelles Environnement et organiser des fêtes et activités pour récolter des fonds
- Avoir une vision à long terme et ne pas vouloir commencer trop grand pour que le projet puisse durer dans le temps
A l’inverse des poules, le projet vole presque de ses propres ailes. Les institutrices et les enfants se l’approprient et s’impliquent. Par exemple, durant les vacances, des institutrices et même des enfants habitant le quartier se sont portés volontaires pour venir nourrir et soigner les animaux. Aussi, la présence des animaux a un impact positif sur la propreté dans l’école. Appuyés par la mascotte « Dimitri » (pour diminution et tri des déchets), les enfants scrutent la cour de récréation avant d’y laisser courir les chèvres. Ils savent que les déchets sont dangereux pour elles. Et l’école foisonne d’autres projets environnementaux et porteurs de sens : des collations collectives, un potager et un verger plantés par les enfants, des nichoirs et mangeoires à oiseaux, le brevet du cycliste et un Plan de Déplacements Scolaires (PDS) ou encore une formation pour les enseignants sur l’importance du « dehors » à l’école donnée par Christophe Vermonden, conseiller pédagogique. Autant de portes d’entrée qui permettent à tous les enseignants de se rallier au projet en fonction de leurs affinités.
OBJECTIF : DEHORS !
L’ensemble des activités est issu d’une volonté de faire sortir les enfants de l’école et de voir la pédagogie autrement. Ainsi, les élèves de 4ème année se rendront au Bubble festival pour y présenter les projets de l’école et un spectacle sur l’environnement. L’école est également en partenariat avec l’école Carrefour avec laquelle ils ont créé un verger, un potager et travaillé sur les déchets. « Il nous semble primordial de montrer aux enseignants qu’à travers ces projets hors les murs, la matière et le programme sont vus et que les enfants vivent leurs apprentissages. », explique la directrice. « Les élèves ne doivent pas être coincés dans un enseignement frontal, ils doivent pouvoir bouger et être en contact avec le vivant, la nature. Ils n’ont pas le temps de se disputer quand ils sont actifs ! ». Faire une dictée dans la cour de récréation, impensable ? Pas tant que ça ! Certaines institutrices l’ont d’ailleurs déjà fait et les bénéfices pour les enfants sont considérables. Ce nouveau cadre offre de bonnes conditions de travail et aide les enfants à se concentrer. À l’avenir, l’école envisage d’ailleurs de créer une classe ouverte dans la cour en aménageant une infrastructure adaptée (bancs, tables, pergola avec plantes grimpantes et hôtels à insectes). Un pas de plus vers la concrétisation des apprentissages scolaires, l’assurance de la pérennité des projets et la recherche permanente d’un mieux vivre ensemble à l’école. Pari réussi à l’école les Peupliers !